top of page
Rechercher

Perdre notre lien avec la nature : une baisse de plus de 50 % en 220 ans

  • Photo du rédacteur: Natasha Dudek
    Natasha Dudek
  • 18 oct.
  • 5 min de lecture
Selon une nouvelle étude, le lien des gens avec la nature aurait diminué de 52 % au cours des 220 dernières années.
Selon une nouvelle étude, le lien des gens avec la nature aurait diminué de 52 % au cours des 220 dernières années.

À mesure que les villes se sont étendues et que le béton a remplacé les espaces verts, nous passons de moins en moins de temps dans la nature, et nous nous sentons de moins en moins connectés à elle. En fait, selon une nouvelle étude publiée dans la revue Earth, le lien des gens avec la nature aurait diminué de 52 % au cours des 220 dernières années. Cette déconnexion grandissante, connue sous le nom d’« extinction de l’expérience », n’est pas qu’une perte personnelle. Selon la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, elle constitue l’un des facteurs majeurs des deux crises actuelles : la perte de biodiversité et les changements climatiques.


L’étude, menée par le professeur Miles Richardson de l’Université de Derby, examine comment notre lien avec la nature a évolué au cours des deux derniers siècles et explore ce à quoi l’avenir pourrait ressembler. Grâce à une simulation informatique basée sur des agents, Richardson a étudié comment des facteurs tels que la croissance urbaine, l’accès aux espaces verts, les attitudes personnelles et l’influence familiale façonnent notre relation à la nature d’une génération à l’autre. Des données historiques sur l’urbanisation et la dégradation de l’environnement ont servi à calibrer le modèle, qui a ensuite permis d’explorer quelles mesures concrètes pourraient ralentir, voire inverser, la baisse du sentiment de connexion à la nature d’ici 2125.


Une fois le modèle développé, Richardson a d’abord vérifié qu’il reflétait fidèlement le déclin historique du lien avec la nature. Il a comparé les résultats du modèle à des tendances réelles, en utilisant la fréquence des mots liés à la nature dans la littérature comme indicateur. Le modèle a réussi à reproduire la tendance observée sur 220 ans, révélant une diminution d’environ 61 % entre 1800 et 2020. Bien qu’il ait légèrement surestimé le déclin maximal de 60,58 % en 1990 et n’ait pas entièrement capté le léger regain à 52,39 % en 2020, il reflète globalement la tendance à long terme de notre perte de lien avec le monde naturel.


Pour comprendre ce qui cause la perte de connexion à la nature, Richardson a réalisé une analyse de sensibilité sur son modèle. En utilisant une approche « un facteur à la fois », il a examiné l’effet de chaque paramètre individuellement afin de voir comment différents facteurs influencent les résultats et les tendances produites par la simulation. L’influence familiale s’est révélée être le facteur dominant : lorsque les parents ont peu de lien avec la nature, cela réduit fortement l’affinité des enfants pour le monde naturel et renforce le cycle de l’« extinction de l’expérience ». Même lorsque d’autres mécanismes de rétroaction étaient supprimés, le modèle reproduisait toujours les tendances historiques, soulignant le rôle central de la transmission familiale dans le développement à long terme de la déconnexion entre humains et nature.


L’étude a ensuite exploré ce qui pourrait arriver à notre lien avec la nature jusqu’en 2125. Sans intervention, le modèle prévoit une baisse continue et régulière. Richardson a testé différents types, niveaux et combinaisons d’interventions : restauration de la nature, renforcement de la transmission intergénérationnelle du lien avec la nature et augmentation de l’engagement dans les milieux naturels. Le scénario le plus prometteur survient lorsque l’accès à la nature est considérablement augmenté (jusqu’à 1000 %) et combiné à des programmes aidant les enfants à développer un lien plus fort avec la nature. Cette combinaison de plus d’espaces verts et de renforcement de l’influence familiale et culturelle entraîne une amélioration significative et durable de la connexion à la nature. L’étude souligne également que les gains de lien avec la nature prennent souvent des décennies à se manifester, ce qui montre l’importance d’agir tôt et de façon soutenue.


Pour mettre ces stratégies en pratique, l’étude propose plusieurs actions concrètes. Renforcer la transmission intergénérationnelle peut passer par des programmes d’implication parentale, des programmes scolaires centrés sur la nature, des activités communautaires et des réseaux entre pairs qui aident les enfants à créer des liens durables avec la nature. La restauration de la nature et l’augmentation de l’accès aux espaces verts sont aussi essentielles, en créant des espaces verts accessibles et biodiversifiés et en intégrant la nature dans la vie quotidienne grâce à un aménagement urbain réfléchi, à la planification des transports et au logement. Une gouvernance adaptative joue également un rôle important, en encourageant des projets riches en nature et en utilisant la planification de scénarios centrée sur la nature pour guider les politiques à long terme. Enfin, surveiller et évaluer les progrès, en suivant l’évolution du lien avec la nature et en intégrant ces données dans les bilans de bien-être, l’éducation et l’environnement, permet d’assurer une amélioration continue. En combinant ces stratégies pour renforcer notre connexion avec la nature, nous pouvons soutenir la santé physique et mentale des communautés, tout en favorisant une appréciation plus profonde du monde naturel et des défis auxquels il fait face, et, par extension, auxquels l’humanité est confrontée.


Bien que l’étude offre des aperçus précieux, il est important d’en considérer les limites. Le modèle simplifie des réalités complexes : il suppose que l’urbanisation et la perte de nature suivent des tendances historiques fixes, utilise un paysage en grille pour représenter l’environnement et se sert des mots liés à la nature comme indicateur du lien historique avec celle-ci. Il suppose aussi que l’accès à la nature entraîne automatiquement un engagement, ce qui peut surestimer l’effet des interventions. De futures recherches pourraient rendre les modèles plus réalistes en intégrant des détails géographiques, des influences sociales au-delà de la famille, des boucles de rétroaction bidirectionnelles où la connexion à la nature influence les comportements, ainsi que des facteurs sociétaux plus larges, améliorant ainsi leur précision et leur pertinence pour guider les politiques.


Notre lien avec la nature s’érode indéniablement, et l’étude de Richardson aide à quantifier et comprendre les facteurs derrière cette perte au cours des 220 dernières années, en soulignant le rôle de la famille et de la transmission intergénérationnelle des attitudes envers la nature. Inverser cette tendance nécessite non seulement plus d’accès aux espaces verts, mais aussi des efforts à l’échelle du système pour renforcer l’engagement avec la nature dès le plus jeune âge.


Même après 220 ans de déclin, il y a des raisons d’espérer : avec des efforts soutenus, les générations futures peuvent reconstruire leur lien avec la nature, même si un retour complet aux niveaux historiques pourrait prendre du temps. Reconstruire cette connexion est essentiel non seulement pour notre santé mentale et physique, mais aussi pour relever les défis environnementaux urgents, comme la perte de biodiversité et le changement climatique. Si ces enjeux vous tiennent à cœur, réfléchissez à la manière dont vous pouvez inspirer l’amour de la nature au sein de votre famille, de vos amis et de votre communauté. Nourrir ces liens est l’une des façons les plus puissantes de soutenir à la fois le bien-être humain et le monde naturel.


Étude :

 
 

©2024 par le Projet de conservation de la nature de Montréal

  • LinkedIn
  • Facebook
  • Twitter
bottom of page